Fabien Bœuf n’est pas un pseudonyme : il ne doit son nom qu’à son nom. Et pourtant, celui-ci résume en un clin d’œil deux aspects de son parcours : la rencontre et les risques musicaux, comme on les trouve dans les « jams » – appelées aussi « bœufs » – et un aspect terrien, ancré au sol, à la réalité naturelle.
Baigné de chanson française et de rock, Fabien Bœuf a joué en 1999 au sein du groupe Poc, avec lequel il a partagé les scènes de Noir Désir, Dolly, Deportivo et bien d’autres. En 2005, après ce passage de plusieurs années à tendance rock, l’auteur-compositeur-interprète se personnalise et se concentre sur le texte, sur l’intime et le poétique, pose les bases de l’esprit de son album « Au-dedans », qui sort en 2007. Concocté à la maison, dans son pays landais, il résume bien cette attention portée aux mots, tout en gardant sous le coude des interprétations plus pop/rock. Enregistré par Fred Commault et mixé par Lucas Chauvière (Java, Salif Keita), l’album reçoit un bon accueil et le propulse sur des routes qui le mèneront à de nouveaux développements. Fabien y consolide son rapport au public, s’accompagnant parfois seul à la guitare. Il croise sur scènes des références marquantes parmi lesquelles les Ogres de Barback, Da Silva, Mano Solo, Adrienne Pauly, ou David Lafore.
Début 2009, une idée originale fait son chemin : enregistrer des titres co-écrits en collaboration avec les artistes croisés au fil des concerts. C’est Bœuf avec les autres, une belle aventure qui débouche sur des morceaux inédits enregistrés en toute simplicité, au pied levé, et où l’on croise Courir les rues, BaliMurphy, Daguerre, Monsieur Lune et d’autres. Une belle revanche de l’artisanat et du coup de coeur.
Récemment père et profondément attaché à une vie simple, observateur dans sa marge, loin des discours stériles et des poses, Fabien Bœuf nous livre aujourd’hui « Les premiers papillons ». Un nouveau rebond qui se nourrit avec bonheur des expériences passées et de nouveautés dans les arrangements. Toujours accompagné de ses musiciens du précédent album, dont la complicité nouée par les années se ressent, Fabien propose une synthèse personnelle de multiples influences bien assumées, et d’avidité de rencontres. La clé idéale pour développer une personnalité, et un bonheur par les temps repliés qui courent si vite. L’écriture, comme la voix, ont pris un nouveau souffle, se promenant entre tranquillité et fêlures
Au gré des chansons, portées par des lignes bien enlevées, des plaisirs rythmiques et de vraies audaces musicales et sonores qui n’empêchent pas les titres de nous trotter dans la tête, on oscille entre la contemplation, le sourire et les doutes. Fabien Bœuf, de son coin du monde, parle de couples et de multiples, d’aller et retour entre le monde explosé et l’intime, de l’angoisse et de la beauté d’un monde dont le naturel s’en va décidément au galop. On y décèle aussi des fines doses d’humour, et un plaisir de jouer plus palpable que jamais.
François DELVOYE